Friday, September 29, 2006

Robert Redeker et l'Islam

Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ?, par Robert Redeker
Par Robert Redeker (Philosophe. Professeur au lycée Pierre-Paul-Riquet à Saint-Orens de Gammeville. Va publier Dépression et philosophie (éditions Pleins Feux)..
Le Figaro
le 19 septembre 2006

Les réactions suscitées par l'analyse de Benoît XVI sur l'islam et la violence s'inscrivent dans la tentative menée par cet islam d'étouffer ce que l'Occident a de plus précieux qui n'existe dans aucun pays musulman : la liberté de penser et de s'exprimer.

L'islam essaie d'imposer à l'Europe ses règles : ouverture des piscines à certaines heures exclusivement aux femmes, interdiction de caricaturer cette religion, exigence d'un traitement diététique particulier des enfants musulmans dans les cantines, combat pour le port du voile à l'école, accusation d'islamophobie contre les esprits libres.

Comment expliquer l'interdiction du string à Paris-Plages, cet été ? Étrange fut l'argument avancé : risque de «troubles à l'ordre public». Cela signifiait-il que des bandes de jeunes frustrés risquaient de devenir violents à l'affichage de la beauté ? Ou bien craignait-on des manifestations islamistes, via des brigades de la vertu, aux abords de Paris-Plages ?

Pourtant, la non-interdiction du port du voile dans la rue est, du fait de la réprobation que ce soutien à l'oppression contre les femmes suscite, plus propre à «troubler l'ordre public» que le string. Il n'est pas déplacé de penser que cette interdiction traduit une islamisation des esprits en France, une soumission plus ou moins consciente aux diktats de l'islam. Ou, à tout le moins, qu'elle résulte de l'insidieuse pression musulmane sur les esprits. Islamisation des esprits : ceux-là même qui s'élevaient contre l'inauguration d'un Parvis Jean-Paul-II à Paris ne s'opposent pas à la construction de mosquées. L'islam tente d'obliger l'Europe à se plier à sa vision de l'homme.

Comme jadis avec le communisme, l'Occident se retrouve sous surveillance idéologique. L'islam se présente, à l'image du défunt communisme, comme une alternative au monde occidental. À l'instar du communisme d'autrefois, l'islam, pour conquérir les esprits, joue sur une corde sensible. Il se targue d'une légitimité qui trouble la conscience occidentale, attentive à autrui : être la voix des pauvres de la planète. Hier, la voix des pauvres prétendait venir de Moscou, aujourd'hui elle viendrait de La Mecque ! Aujourd'hui à nouveau, des intellectuels incarnent cet oeil du Coran, comme ils incarnaient l'oeil de Moscou hier. Ils excommunient pour islamophobie, comme hier pour anticommunisme.

Dans l'ouverture à autrui, propre à l'Occident, se manifeste une sécularisation du christianisme, dont le fond se résume ainsi : l'autre doit toujours passer avant moi. L'Occidental, héritier du christianisme, est l'être qui met son âme à découvert. Il prend le risque de passer pour faible. À l'identique de feu le communisme, l'islam tient la générosité, l'ouverture d'esprit, la tolérance, la douceur, la liberté de la femme et des moeurs, les valeurs démocratiques, pour des marques de décadence.

Ce sont des faiblesses qu'il veut exploiter au moyen «d'idiots utiles», les bonnes consciences imbues de bons sentiments, afin d'imposer l'ordre coranique au monde occidental lui-même.

Le Coran est un livre d'inouïe violence. Maxime Rodinson énonce, dans l'Encyclopédia Universalis, quelques vérités aussi importantes que taboues en France. D'une part, «Muhammad révéla à Médine des qualités insoupçonnées de dirigeant politique et de chef militaire (...) Il recourut à la guerre privée, institution courante en Arabie (...) Muhammad envoya bientôt des petits groupes de ses partisans attaquer les caravanes mekkoises, punissant ainsi ses incrédules compatriotes et du même coup acquérant un riche butin».

D'autre part, «Muhammad profita de ce succès pour éliminer de Médine, en la faisant massacrer, la dernière tribu juive qui y restait, les Qurayza, qu'il accusait d'un comportement suspect». Enfin, «après la mort de Khadidja, il épousa une veuve, bonne ménagère, Sawda, et aussi la petite Aisha, qui avait à peine une dizaine d'années. Ses penchants érotiques, longtemps contenus, devaient lui faire contracter concurremment une dizaine de mariages».

Exaltation de la violence : chef de guerre impitoyable, pillard, massacreur de juifs et polygame, tel se révèle Mahomet à travers le Coran.

De fait, l'Église catholique n'est pas exempte de reproches. Son histoire est jonchée de pages noires, sur lesquelles elle a fait repentance. L'Inquisition, la chasse aux sorcières, l'exécution des philosophes Bruno et Vanini, ces mal-pensants épicuriens, celle, en plein XVIIIe siècle, du chevalier de La Barre pour impiété, ne plaident pas en sa faveur. Mais ce qui différencie le christianisme de l'islam apparaît : il est toujours possible de retourner les valeurs évangéliques, la douce personne de Jésus contre les dérives de l'Église.

Aucune des fautes de l'Église ne plonge ses racines dans l'Évangile. Jésus est non-violent. Le retour à Jésus est un recours contre les excès de l'institution ecclésiale. Le recours à Mahomet, au contraire, renforce la haine et la violence. Jésus est un maître d'amour, Mahomet un maître de haine.

La lapidation de Satan, chaque année à La Mecque, n'est pas qu'un phénomène superstitieux. Elle ne met pas seulement en scène une foule hystérisée flirtant avec la barbarie. Sa portée est anthropologique. Voilà en effet un rite, auquel chaque musulman est invité à se soumettre, inscrivant la violence comme un devoir sacré au coeur du croyant.

Cette lapidation, s'accompagnant annuellement de la mort par piétinement de quelques fidèles, parfois de plusieurs centaines, est un rituel qui couve la violence archaïque.

Au lieu d'éliminer cette violence archaïque, à l'imitation du judaïsme et du christianisme, en la neutralisant (le judaïsme commence par le refus du sacrifice humain, c'est-à-dire l'entrée dans la civilisation, le christianisme transforme le sacrifice en eucharistie), l'islam lui confectionne un nid, où elle croîtra au chaud. Quand le judaïsme et le christianisme sont des religions dont les rites conjurent la violence, la délégitiment, l'islam est une religion qui, dans son texte sacré même, autant que dans certains de ses rites banals, exalte violence et haine.

Haine et violence habitent le livre dans lequel tout musulman est éduqué, le Coran. Comme aux temps de la guerre froide, violence et intimidation sont les voies utilisées par une idéologie à vocation hégémonique, l'islam, pour poser sa chape de plomb sur le monde. Benoît XVI en souffre la cruelle expérience. Comme en ces temps-là, il faut appeler l'Occident «le monde libre» par rapport au monde musulman, et comme en ces temps-là les adversaires de ce «monde libre», fonctionnaires zélés de l'oeil du Coran, pullulent en son sein.

Source

Saturday, September 23, 2006

Le Vatican

On n’a retenu du discours de Benoît XVI que son attaque contre l’islam. En fait, ses propos visaient tout autant les Occidentaux, explique le quotidien de Francfort.
Pendant six jours, le pape Benoît XVI a arpenté la Bavière, sa terre d’origine. Il a prié dans les églises et en plein air, prêché devant des milliers de personnes et donné une conférence. Les images joyeuses de Munich, Altötting et Ratisbonne resteront dans les mémoires. Mais, avec ses paroles, Benoît XVI a écrit l’Histoire. Car ce n’est pas le retour au pays qui était le thème de ce voyage, mais la défense de l’Occident chrétien – contre les autres et contre lui-même.
En avril 2005, des cardinaux venus du monde entier élisaient au trône de saint Pierre Joseph Ratzinger, un Allemand, un homme originaire d’un pays qui a initié la Réforme, les Lumières et la Seconde Guerre mondiale. L’histoire allemande a donné au nouveau pontife un regard pénétrant sur l’abîme de l’homme et les errements des peuples. Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi pendant de nombreuses années, il s’était montré attaché aux racines chrétiennes de l’Europe, s’était opposé à l’Eglise allemande sur les rapports qu’elle entretenait avec l’Etat et aux philosophes sur le pouvoir et le droit, et avait développé un profil théologique et politique qui en faisait le successeur naturel de Jean-Paul II.
Comme son prédécesseur, Benoît XVI ne s’est pas adressé uniquement aux catholiques. Ses discours ont évoqué les questions fondamentales de la vie, de la foi et de la raison. Les textes de l’Ancien et du Nouveau Testament qu’il a commentés parce qu’ils correspondaient au temps liturgique traduisent selon lui l’espoir de chacun que son histoire personnelle, comme celle du monde, ait un sens et un but. Les philosophes, de Platon à Kant, auxquels il a fait référence dans sa conférence, sont pour lui la preuve que les hommes sont des êtres “de raison” et peuvent donc s’entendre en dépit des frontières de la culture et de la religion. Les critères du bien et du mal et l’idée que la dignité de l’homme consiste à vivre selon cette “nature raisonnable” ne sont pas propres au catholicisme, ni d’ailleurs à la morale personnelle du pontife. Benoît XVI défend simplement l’héritage européen des Lumières – qui est menacé par la division manichéenne du monde entre croyants et non-croyants, entre “pour nous” et “contre nous”. Ce n’est pas le paysage des Alpes bavaroises qui constitue la trame de ses interventions, mais les discours des puissants de ce monde, d’Ahmadinedjad à Bush.
Pour Benoît XVI, la vocation universelle de la pensée chrétienne imprégnée des Lumières n’est pas uniquement menacée de l’extérieur, mais aussi de l’intérieur. Les propos de Kant, qui déclarait avoir dû mettre de côté la pensée pour faire une place à la foi, traduisent selon lui un dilemme. La raison “pure”, qui se définit et trouve sa liberté en excluant Dieu de son champ de réflexion, a tendance à ne se pencher que sur ce qu’on peut savoir objectivement. Elle risque ainsi de devenir un bon “instrument”, mais qui ne suffit pas pour bien vivre.
Le pape a trouvé ces derniers jours plusieurs expressions percutantes pour qualifier cette autolimitation de la raison. Il a parlé de “surdité vis-à-vis de Dieu” et de “raccourcissement du rayon de la raison”, et a ainsi précisé, tantôt avec des mots simples, tantôt avec des mots complexes, ce qu’il qualifie depuis des années de “dictature du relativisme”.
Les fondements de la civilisation sont en jeu si le désir de progrès scientifique et technique et de liberté individuelle touche également la sphère de ces valeurs dont l’homme ne doit pas disposer librement, que ce soit au début ou à la fin de la vie. Ce risque n’est toutefois qu’un des aspects de la dialectique des Lumières. Comme si ce voyage et l’anniversaire des attentats du 11 septembre n’étaient pas une coïncidence, Benoît XVI a évoqué une “pathologie” qui se manifeste depuis longtemps dans les rapports entre l’Occident moderne et le reste du monde. Pour le pape, le rejet croissant des valeurs occidentales en Asie et en Afrique n’est pas dû à un refus de la modernité. Le pape voit dans l’antioccidentalisme qui se répand sur l’ensemble du globe une réaction à une conception de la raison qui considère la religion et la foi comme irrationnelles et antérieures à l’esprit scientifique et qui ouvre ainsi grand la porte au cynisme.
Benoît XVI précise ainsi son diagnostic de la crise que connaît l’Occident. La faille qui apparaît entre les valeurs occidentales et la réalité politique n’est pas due à une double morale qui serait, depuis, retombée sur ses créateurs. Ce serait trop simple. Pour le pape, il existe dans ce qu’on appelle le monde chrétien, comme dans le monde de l’islam, des mouvements qui ne veulent rien savoir des critères raisonnables du bien et de la vraie vie, auxquels appartient également le respect du sacré.

Daniel Deckers, Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung

Friday, September 15, 2006

Un point de vue Israélien

ISRAËL • Personne ne pourra dire qu’il ne savait pas
Comment des démocrates peuvent-ils accepter que tant d’injustices soient faites aux Palestiniens? ? Spécialiste des Territoires palestiniens, la journaliste israélienne Amira Hass s’interroge.
Laissons de côté ces Israéliens qui, par idéologie, soutiennent la dépossession du peuple palestinien parce que “Tu [Dieu] nous as choisis”. Laissons de côté ces juges qui couvrent la politique militaire de meurtre et de destruction. Laissons de côté ces officiers qui emprisonnent sciemment tout un peuple entre des murs, des tours de guet fortifiées, des mitrailleuses, des barbelés et des projecteurs aveuglants. Et laissons de côté nos ministres et tous ces gens qui comptent – les architectes, les planificateurs et, plus généralement, les concepteurs et les exécutants de la politique gouvernementale.
Parlons plutôt des autres. Des historiens et des mathématiciens, des éditeurs, des vedettes médiatiques, des psychologues et des médecins, des avocats qui ne soutiennent pas le Goush Emounim [l’extrême droite religieuse] ou Kadima [le parti au pouvoir], des enseignants et des éducateurs, des amoureux de la nature, des magiciens des hautes technologies. Où êtes-vous ? Et vous, les spécialistes du nazisme, de la Shoah et du goulag ? Etes-vous vraiment en faveur de ces lois discriminatoires qui décrètent que, pour les ravages provoqués par la dernière guerre, les Arabes de Galilée ne recevront pas les mêmes indemnisations que leurs voisins juifs ?
Se peut-il que vous souteniez ce code de la nationalité raciste qui interdit à un Israélien arabe de vivre avec sa famille dans son propre logis ? Se peut-il que vous souteniez les expropriations programmées en Cisjordanie pour créer un nouveau quartier d’implantation juive et une nouvelle route, le “yehudim bilvad” [pour Juifs seulement] ? Se peut-il que vous soyez d’accord pour qu’un tiers de la Cisjordanie soit désormais inaccessible aux Palestiniens ? Que vous acceptiez une politique qui empêche des dizaines de milliers de citoyens étrangers d’origine palestinienne de rendre visite à leur famille dans les Territoires ?
Pensez-vous réellement vous en sortir avec l’argument de la sécurité pour trouver normal d’interdire aux étudiants gazaouites d’étudier l’ergothérapie à Bethléem et la médecine à Ramallah, ou aux malades de Rafah de recevoir des soins à Ramallah ? Pensez-vous pouvoir vous réfugier derrière le “lo yadanou” [“nous ne savions pas”] lorsqu’on vous parlera de la discrimination pratiquée dans l’accès à l’eau [sous le contrôle exclusif d’Israël] et qui laisse des milliers d’immeubles palestiniens sans eau durant les canicules ? Ou du fait que Tsahal a pu impunément ceinturer les villages par des barrages empêchant les habitants d’aller s’approvisionner en eau ?

Un régime spoliateur et oppresseur insatiable

Il n’est pas possible que vous ne voyiez pas les lourds portiques d’acier qui jalonnent la Nationale 344, cette route qui traverse l’ouest de la Cisjordanie, mais sans accès aux villages palestiniens. Il n’est pas possible que vous souteniez l’interdiction faite à des milliers de fermiers d’accéder à leurs champs. Ou que vous souteniez la quarantaine imposée à Gaza et qui empêche la livraison de médicaments aux hôpitaux et la fourniture d’électricité et d’eau à 1,5 million d’êtres humains. Se peut-il que vous ne sachiez pas ce qui se passe à quinze minutes de vos cabinets et de vos universités ? Se peut-il que vous souteniez ce système qui voit des soldats hébreux dresser des barrages au cœur de la Cisjordanie et bloquer des dizaines de milliers de civils des heures durant sous un soleil de plomb et trier les habitants selon leur âge ou selon qu’ils viennent de Naplouse ou de Tulkarem ? Ou, pour l’exemple, placer en détention une femme malade qui a eu le tort de sortir de la file ? Le site (www.machsomwatch.org) [ONG israélienne chargée de surveiller les agissements des soldats israéliens aux postes de contrôle] est accessible à tous et regorge de témoignages et de documents qui rendent compte de ces horribles pratiques. Il n’est pas possible que ceux qui s’insurgent à la moindre croix gammée sur une tombe juive en France ou au moindre titre antisémite dans un journal local espagnol ne soient pas informés de ce qui se passe en Cisjordanie et ne s’insurgent pas.
Comme Juifs, nous jouissons tous du privilège que représente pour nous Israël et c’est pourquoi nous sommes tous, bon an mal an, des collaborateurs [du système]. La question est : que fait chacun d’entre nous pour minimiser sa collaboration avec un régime spoliateur et oppresseur insatiable ? Il ne suffit pas de signer des pétitions et de se plaindre. Israël est une démocratie pour ses Juifs. Nos vies ne sont pas en danger, nous ne risquons pas d’être placés en camp d’internement et nous pourrons toujours nous détendre à la campagne ou à l’étranger. C’est pourquoi le poids de notre collaboration et de notre responsabilité directe est terriblement lourd.
Amira Hass (Ha'aretz)